Emploi et handicap : reprendre confiance grâce au travail en ÉSAT

Atteinte d’un glaucome congénital, Christèle travaille à l’Ésat Odette Witkowska de l’association Valentin Haüy depuis 21 ans. Stéphane, moniteur d’atelier en milieu protégé, accompagne Christèle et d’autre travailleurs handicapés dans leurs tâches au quotidien.  Ils nous racontent leurs parcours et leurs métiers.

 

Comment avez-vous débuté vos carrières respectives à l’ÉSAT Odette Witkowska ?

  • Christèle : Mon école spécialisée m’a proposé de faire un stage là-bas alors que j’avais 20 ans et que j’étais malvoyante. Le stage m’a énormément plu. Pour moi c’était important de découvrir le monde du travail. Le travail m’a aidé à me battre quand j’ai perdu la vue en 2004.
  • Stéphane : Moi j’ai travaillé pendant 15 ans dans l’industrie métallurgique, et il y a 11 ans j’ai fait un AVC. Lors de ma convalescence à l’hôpital, je me suis lié avec une jeune femme et je me suis mis à l’aider. Je la sortais dans le parc, je l’emmenais à ses séances de kiné … ça m’a donné envie de me reconvertir dans l’aide aux personnes handicapées, et avec mon passé dans la production, je suis devenu moniteur d’atelier. J’ai vraiment trouvé un métier qui me plait.

Christèle, en quoi consiste votre travail à Odette Witkowska ?

  • Christèle : Je suis ouvrière, j’ai changé trois fois d’atelier depuis mon arrivée. Juste avant mon poste actuel, je faisais de la mise sous pli et du triage du courrier. C’était extra, j’adorais ça ! Ça vous donne l’impression de voyager en regardant les adresses, vous êtes à Lyon et puis d’un coup vous êtes à Nice et en une seconde vous voyagez à Berlin ! Depuis 2009 je suis dans l’atelier 5 où je monte des boîtes de connexion automobiles et je forme les stagiaires non-voyants qui arrivent à l’atelier. Après 21 ans, c’est une grande fierté pour moi mais je veux encore grandir dans ma tête et continuer à évoluer.
  • Stéphane : Pour revenir sur Christèle, elle a un niveau d’autonomie assez exceptionnel pour une personne non voyante même au-delà du travail. Elle a son propre appartement, elle prend les transports … Elle est sur une production vraiment essentielle pour l’atelier, elle est quasiment une des seules à pouvoir faire ce travail. Donc du coup elle a tellement de faculté que d’un commun accord, on a décidé que c’était elle qui formerait les stagiaires sur ce poste. C’est une reconnaissance de son travail. C’est d’ailleurs elle qui m’a montré le travail quand je suis arrivé dans l’atelier 5 !

Et vous Stéphane, en quoi consiste le métier de moniteur d’atelier ?

Mon rôle c’est de faire tourner l’atelier par rapport aux commandes, gérer les stocks, préparer les commandes pour le client et puis il y a toute un partie formation des travailleurs sur des activités. Comme j’aime à l’expliquer à des personnes qui ne connaissent pas le métier de moniteur d’atelier, c’est 50 % de production, 50 % de médico-social, parce qu’on est toujours en lien avec les éducateurs, l’infirmière, la psychologue, l’assistante sociale, la chargée d’insertion, donc c’est un métier très diversifié et intéressant.

Christèle, vous avez perdu la vue alors que vous étiez déjà à l’ÉSAT, comment avez-vous vécu cette période de votre vie ?

Au départ j’ai fait une grosse déprime, j’ai pris 40 kilos, je n’ai rien ne dis à personne et j’ai tout pris sur moi. Et puis je me suis dit : il y a deux solutions, soit tu te bats pour garder ton autonomie et ton chez toi, soit tu baisses les bras. J’ai choisi de me battre. Maintenant ma maladie je l’accepte, c‘est mon quotidien et je m’adapte.

Christèle a vu son métier évoluer avec les années, comment l’équipe encadrante de l’Esat accompagne ce changement ?

  • Stéphane : Un de nos rôles c’est de mesurer leur savoir avec la RAE, la reconnaissance des acquis et de l’expérience. On les met en situation de passage d’examen sur une tache simple. Ça peut être monter un carton, scotcher, du montage mécanique …  Et à la fin, ils obtiennent comme une espèce de diplôme qu’on leur remet officiellement en présence du directeur. C’a n’a pas de valeur dans le milieu ordinaire mais ils peuvent les mettre sur leur CV lorsqu’ils cherchent des stages dans d’autres ESAT. C’est vraiment une certification de leur savoir. Petit niveau ou grand niveau, ils ont tous leurs diplômes.
  • Christèle : Moi j’en ai passé deux. Même si c’est qu’un bout de papier, pour moi c’est quand même une reconnaissance importante.

En conclusion, que représente le travail pour vous Christèle ?

Pour moi le travail c’est tout ! Comme je n’ai pas de diplôme, l’ESAT m’offre ce que je ne peux pas avoir à l’extérieur. Ça me donne le goût de me lever le matin, et ça c’est important.
Découvrir le Centre Odette Witkowska

Le Centre Odette WITKOWSKA de l’association Valentin Haüy accompagne 92 travailleurs en situation de handicap visuel porteurs ou non de troubles associés. L’établissement est implanté dans un environnement privilégié à proximité du centre de Lyon tout en bénéficiant d’un parc protégé.
Pour en savoir plus sur les missions et les activités du centre, rendez-vous sur le site internet : http://www.esat-witkowska.fr/

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