Vivre avec un glaucome à la Résidence Autonomie Valentin Haüy

C’est la semaine mondiale du glaucome. À cette occasion, découvrez les témoignages de résidents de la Résidence Autonomie de l’association Valentin Haüy (Paris 19e) atteints de cette maladie dégénérative de l’œil,  une affection encore trop méconnue du grand public qui touche au moins un million de personnes en France.

Mme Deunff, résidente depuis 2012 

Comment voyez-vous ? 

Mon champ visuel est très restreint à l‘œil droit. À gauche, j’ai 8/10e : je peux encore lire l’avant-dernière ligne chez l’ophtalmologue ! Mais on ne sait pas combien de temps cela va durer. 

Comment avez-vous su que vous aviez un glaucome ? 

C’est lors d’un contrôle en 2005 que j’ai été diagnostiquée. Je pensais ne rien avoir et je suis ressortie du cabinet avec un papier indiquant « glaucome » et « risque de destruction du nerf optique ». Depuis, je veille à mettre à une goutte de collyre dans chaque œil dans tous les soirs. J’en ai toujours dans mon sac à main si besoin.

Comment a évolué le glaucome et comment avez-vous vécu avec ?

C’est mon champ visuel à droite qui s’est restreint le premier. Lorsque je conduisais encore, une voiture venue de la droite a raflé ma voiture. J’ai réalisé que je ne l'avais pas vue. J’ai arrêté de conduire dès que je me suis rendu compte que mon champ visuel diminuait. Pour le reste, je me suis habituée : je regarde ce qu’il y a en face et puis je tourne la tête pour voir ce qu’il y a sur les côtés.

Ce qui vous a décidé à venir à la Résidence ?

Je voulais déménager avant que ma vue se dégrade complètement. Au début, j’imaginais rester deux ou trois ans et devoir aller en Ehpad. J’y suis depuis 10 ans ! Ici c’est absolument idéal. On est vraiment chez soi. On peut rester dans son studio ou son appartement si on veut être tranquille, ou bien sortir pour rencontrer d’autres résidents et le personnel. On peut participer aux animations proposées : conférences, lectures, concerts… Tout est vraiment fait pour le meilleur épanouissement des résidents. Par exemple, pour ma rééducation du genou, deux jeunes en service civique m’ont accompagnée à la piscine une fois par semaine.

Mme Lebourgeois, résidente depuis 2018

Comment voyez-vous ?

Je distingue seulement des formes. Je ne vois plus de l’œil gauche et mon œil droit est en très mauvais état.

Quand avez-vous su que vous aviez un glaucome ?

J’étais à la retraite quand la maladie s’est déclarée et que le diagnostic a été posé.

Comment a évolué le glaucome et comment avez-vous vécu avec ?

Un jour où je conduisais encore la voiture, je me suis subitement rendu compte que je ne voyais plus rien de l’œil gauche. Je ne voyais même pas dans le rétroviseur. Malheureusement, le traitement n’était pas adapté. C’est terrible une erreur médicale car quand le nerf optique est détruit, on ne peut pas le remplacer.

Ce qui vous a décidé à venir à la Résidence ?

Je me suis dit qu’il valait mieux que j’entre dans une institution pendant que je voyais encore un peu. Après une période d’essai, j’ai donné mon accord. J’avais demandé un plan du studio et j’ai fait une maquette pour l’aménager avec mes meubles. Ici, c’est très bien. Par exemple, il y a possibilité d’être accompagné pour aller chez le médecin ou pour aller faire les courses.
Par ailleurs, je connaissais déjà l’association Valentin Haüy pour avoir été bénévole au comité de Charente-Maritime. J’ai bénéficié de cours d’informatique et j’ai apprécié les temps d’accueil et de partage proposés par le comité.

Quelles sont vos activités ?

Je cuisine un peu. Le soir, je dîne chez moi et quelquefois aussi pour le déjeuner. Je suis aidée pour l’informatique car je voudrais passer à une solution vocalisée. Il y a des activités ici que j’apprécie beaucoup, comme le cours de gym qui est assez tonique. On nous réunit aussi pour choisir des livres audio de la médiathèque Valentin Haüy. Enfin, je participe à l’animation « Mots croisés » - tout est dans l’abstrait, c’est une bonne gymnastique pour le cerveau ! Il y a aussi « Questions pour des champions », c’est assez drôle.

M. Clément, résident depuis 2015

Comment voyez-vous ?

Je ne vois plus rien. Je suis incapable de vous dire si les lumières sont allumées ou pas.

Comment avez-vous su que vous aviez un glaucome ?

Dans les années 80, j’ai consulté car je sentais que j’étais gêné pour dessiner les plans - Antiquaire, je dessinais des plans de cheminées, de fontaines ou autres d’éléments d’architecture. L’ophtalmologue a détecté le glaucome à un œil.

Comment a évolué le glaucome et comment avez-vous vécu avec ?

J’ai eu un bon ophtalmologue qui m’a soigné et fait du laser à plusieurs reprises. Mais je reconnais que je n’ai pas toujours bien pris soin de moi. En déplacement pour mon travail, les collyres restaient parfois dans la voiture, quelquefois même en plein soleil. J’ai aussi continué à décaper des pierres et des meubles, sans forcément protéger mes yeux. À 70 ans, j’ai perdu un œil. L’autre œil à tenu à peu près jusque dans les années 2011. À 80 ans, j’ai été obligé d’arrêter mon travail qui me passionnait. Enfin, alors que j’étais à la résidence depuis quelques mois, j’ai reçu l’angle d’un séchoir à linge dans l’œil gauche en me baissant brutalement.  J’ai attendu pour consulter car c’était la période de Noël et je me suis dit que ça allait être compliqué. J’aurais dû y aller tout de suite. Il y avait du sang dans l'oeil et c'était terminé. 

Ce qui vous a décidé à venir à la Résidence ?

Je ne voyais plus suffisamment pour me débrouiller et m’occuper de ma femme qui avait fait un AVC. J’étais dans une maison un peu isolée, à la campagne, donc ce n’était plus possible.  Ici, c’est parfait ! On a une sécurité tout à fait excellente. Par contre, ma femme ne pouvait pas venir car il lui fallait être en Ehpad.

Quelles sont vos activités ?

Je suis autonome. Je ne suis pas ou peu aidé dans les tâches du quotidien. J’ai consacré beaucoup de temps à l’écriture de ma biographie qui vient de sortir. Des résidents ont participé à la relecture du livre. Et sinon, je lis les livres audio de la médiathèque Valentin Haüy.
Quand je suis arrivé, je voyais encore un peu, et je me promenais dans le quartier, par exemple au parc des Buttes-Chaumont. J’y ai même conduit d’autres personnes aveugles avec moi. Aujourd’hui, comme je ne vois plus, je ne sors quasiment plus. Par contre, dans la résidence, je me déplace parfaitement. Je la connais par cœur, c’est comme si j’en avais dessiné le plan !

En savoir plus sur la Résidence Autonomie Valentin Haüy 

Glaucome : 5 choses à savoir sur cette maladie 

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